Authentiquement vôtre

Qu’est-ce que l’authenticité ? Pour moi, il s’agit d’une attitude essentielle pour créer un climat de confiance. Face à des personnes sincères, on se sent naturellement en sécurité.

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Je me souviens de cette première rencontre avec un écrivain romand, un grand bonhomme humble qui ressemble un peu à Gandalf ou Merlin. Cela se passait devant la toile représentant le Wetterhorn, au fond du salon du Grand Hôtel des Rasses. Face à un parterre de lettrés, ce facétieux poète avait clamé l’importance de la lecture en tant qu’acte et cela indépendamment de la valeur du contenu : J’ai lu de tout moi, y compris du Barbara Cartland… disait-il.
Quant à moi, j’avais fait pire.‧Il m’arrivait dans mes jeunes années de lire des livres de la collection Harlequin que ma marraine me refilait par carton… Je me gardais cependant de m’en vanter ce soir-là au Grand Hôtel des Rasses.

Oser être moi-même me demande encore aujourd’hui des efforts, mais j’y arrive souvent, de plus en plus souvent. Sur le chemin de l’authenticité que je continue d’arpenter, je partage avec vous quelques étapes qui ont compté pour moi :

1. Warren BENNIS, sILICON vALLEY, bASEBALL

En 2009, toute la famille se trouve en Silicon Valley. Quand les enfants sont à l’école et mon mari absorbé par la start up qu’il lance avec des amis, je me rends à la bibliothèque de Santa Clara. C’est là que je découvre Warren Bennis et son livre On becoming a leader dans lequel il défend l’idée que devenir un leader c’est d’abord devenir soi-même. Il explique que se connaître soi-même implique de séparer qui je suis et qui je veux être de ce que le monde pense que je suis et veut que je sois. Pour parfaire mon anglais, je rencontre une fois par semaine JJ L., un Texan de 70 ans exilé en Californie, mon professeur de slang et de baseball, et qui recherche quelqu’un pour pouvoir pratiquer son français. Ensemble, nous déconstruisons nos préjugés en découvrant la culture de l’autre même si je crois qu’il n’a pas encore pu avaler que les Européens mangent parfois des escargots et des cuisses de grenouille. Il m’a beaucoup appris par son écoute, lui qui pratiquait la langue des signes et servait d’interprète aux personnes sourdes-muettes. Avec lui j’ai développé un anglais plein de sous-entendus et de double sens qui m’a parfois mise dans des situations cocasses. Nous nous amusions beaucoup, nous étions vrais l’un avec l’autre. Ces deux vieux messieurs Warren et JJ ont contribué à me faire évoluer vers plus d’ouverture aux autres et plus de respect pour mes besoins.

2. Carl r. rogers plutôt qu’un mba

Rentrée de Californie, alors que j’occupe un poste de direction, je poursuis mon périple et plusieurs chemins me mènent vers Carl R. Rogers et l’approche centrée sur la personne. Je souhaitais développer mes compétences à entrer en relation et à comprendre les êtres humains pour être une meilleure leader. Les personnes à qui je décris mon besoin me citent alors Rogers comme le socle, la base, bref du solide. Plutôt qu’un MBA, je débute alors mon cursus de praticienne en relation d’aide (un métier qui consiste à accompagner toute personne qui face à un problème recherche de l’aide pour explorer des solutions en activant ses propres ressources).

Au cours de cette formation expérientielle, je peux vérifier que l’être humain s’il est compris et accepté, aura tendance à abandonner les fausses défenses dont il a usé pour affronter la vie et à pouvoir s’accepter tel qu’il est.

Il n’y avait pas place en lui pour la feinte ni pour la ruse. Quoi qu’il arrivât, il devait rester lui-même[…] De plus, il n’aurait plus la prétention, même tacite, de savoir ce qu’il ignorait. Martin Eden, Jack London

3. en route vers l’authenticité avec martin eden.

Aujourd’hui je poursuis ma route et je tends vers l’authenticité. Parfois j’y arrive et c’est toujours une agréable surprise de voir que par ma sincérité, je dégage la confiance qui permet à l’autre d’être plus vrai. Si je parviens – tout en faisant preuve de respect et prévenance à l’égard des autres – à être spontanée, je favorise un climat de croissance. Si je me montre telle que je suis, alors l’autre peut aussi être qui il ou elle est.

 

En Silicon Valley, je découvre des auteurs humanistes comme Abraham Maslow et aussi des théoriciens du management comme Douglas McGregor, Chris Argyris, James MacGregor Burns, Bernard Morris Bass.

 

Je ne lis plus les gourous du management. J’ai l’impression - c’est un avis arbitraire j’en suis consciente - que tout a été dit par des femmes et des hommes qui ont vécu la deuxième guerre mondiale et qui ne voulaient plus qu’une telle horreur se reproduise. A la place, je lis de la poésie qui engendre chez moi de saines questions et m’ouvre à plus de créativité. Je consulte des ouvrages qui m’aident à comprendre la complexité du monde et à prendre ma place en tant que sujet humain. Comme  Martin Eden, héros du roman éponyme de Jack London, je m’efforce d’utiliser mes ressources pour accomplir ce que j’estime juste et beau et pour écrire ce qui me paraît important.

Il y a tant de chose en moi que je voudrais dire ! […]Mais c’est tellement immense, je ne réussis pas à trouver la façon d’exprimer ce qui fait vraiment partie de moi. C’est une tâche grandiose de transmuer en verbe le monde du sentiment et de la sensation à l’aide de mots écrits ou parlés qui à leur tour introduirons le lecteur ou l’auditeur dans ce même monde de sentiments et de sensations. Martin Eden.